La Galerie et Librairie Ombres Blanches à Toulouse, 50 rue Gambetta / 3 rue Mirepoix
Du 17 juin au 10 septembre 2023
Éditions, estampes et livres d’artistes
Djamel Meskache, Claudine Martin et Tatiana Levy. Ils sont trois et ils construisent depuis plus de trois décennies un faire société inédit avec au moins 90 auteurs et une bonne trentaine d’artistes mais parfois les catégories ne fonctionnent pas !
Plus vraisemblablement, c’est avec trois centaines d’auteurs si l’on compte ceux qu’ils publient en revues depuis plus de 30 ans et puis je ne sais combien de libraires, de bibliothécaires et enfin de lecteurs : bref, ils engagent peut-être pas loin de trente mille personnes à faire société au sens que John Dewey donnait de la démocratie : « Une démocratie est plus qu’une forme de gouvernement ; elle est d’abord un mode de vie associé, d’expériences communes communiquées. » Qui peut se réclamer d’un tel projet aujourd’hui ? Les communicants de l’audio-visuel, les politiques, les as de l’entertainment ? Oui ! quantitativement, ils dépassent largement les Tarabuste mais c’est toujours chez eux en termes d’audience, de publics à capter, de captifs donc… et non de personnes libres parce qu’elles font société.
[…] La liberté du poème, du poète, du lecteur, de l’éditeur, c’est autant d’espaces empiriques à inventer pour augmenter nos marges d’incertitude, pour réduire la part des assis et des pouvoirs en chacun de nous, de nos paroles et relations. C’est très exactement, me semble-t-il, ce que fait également le travail éditorial des Tarabuste : accueillir et poursuivre autant d’espaces empiriques de liberté que de rencontres entre auteur-éditeur-lecteur. Cela ne tient pas à de grands principes ou à des propos généraux que le quotidien éditorial réduirait à une peau de chagrin voire contredirait, cela tient à une ténacité éthique et poétique que l’on peut mesurer à quelques orientations fortes : assurer une autonomie forte de toute l’activité éditoriale à partir d’un engagement poétique et éthique tout aussi fort et libre de toute dépendance autre qu’amicale ; logiquement donc, construire des amitiés plurielles qui peuvent résister aux aléas de la vie et du monde, et qui ne cessent de lier poèmes et rencontres ; pluraliser les espaces
empiriques de liberté dans et par des modes de regroupement (faire société par et avec les poèmes – on a compris que ceux-ci ne sont réductibles ni à un genre ni à une forme littéraire) avec des collections, des expositions, des rencontres, des anthologies et des numéros de revues qui adoptent des modes de porosité et de solidarité toujours à rejouer tout en consolidant des fidélités, des chemins partagés le plus longtemps possible.