Au Château d’eau – Château d’art
Exposition du 12 au 27 avril 2025
Commissaire : Fanny Testas
Artistes : Lola Barrett, Clarice Calvo-Pinsolle, Benoît Déchaut, Roxane Rajic, Pedro Riofrío, SHIFT Entity – Pierre-Clément Malet & Axelle Devaux
Jeudi 11 avril • 18h • Vernissage, concerts et performances des artistes de l’exposition

Fanny Testas déploie son programme The Tuning of the Afterworld pour La Box en proposant une exposition en deux volets, des interventions, workshops, concerts et performances.
Un coquillage est l’amorce de ce programme. Ce coquillage, je l’ai récupéré chez mes grands-parents après leur mort. Objet d’affection, il a le pouvoir de me plonger dans mon enfance, lorsque je le collais à mon oreille pour écouter les vagues de littoraux inconnus. Forme organique, ce squelette se mue ici en un artéfact : libre à vous d’y coller vos oreilles. Il vous mènera dans des paysages imaginaires, ceux de votre intériorité, ceux du flux et du reflux de votre circulation sanguine amplifiés au creux de l’objet-portail.
The Soundscape: Our Sonic Environment and the Tuning of the World, texte de référence écrit par le compositeur, théoricien et pédagogue R. Murray Schafer en 1977, introduit les notions « d’écologie acoustique » et de « paysage sonore ». Le programme curatorial reconsidère ces codes universalistes et anthropocentristes et nos liens au sonore dans le contexte écologique actuel. L’artiste sonore et enseignant Pali Meursault – dans l’épisode Soundscapes, l’invention du paysage sonore de son émission radiophonique L’Oreille Électrique diffusée sur Pi-Node en 2020 – remarque ceci : R. Murray Schafer « n’associe à sa conception de paysage sonore aucun travail réflexif, aucune épistémologie du paysage sonore n’est faite. Il ne prend jamais la peine d’interroger ni même d’établir sa conception du paysage sonore. Pour lui, ce n’est pas nécessaire car le paysage sonore est une évidence universelle. Il n’y aucune raison de se demander s’il en existe une conception différente ou si un paysage peut être perçu depuis des points de vues antagonistes. ». Dans son texte Against soundscape (2007), l’anthropologue Tim Ingold a lui aussi critiqué le concept de paysage sonore qui n’est pour lui pas pertinent pour la recherche anthropologique. En réponse à ces réflexions, The Tuning of the Afterworld cherche les accords (tuning en anglais) entre une conscience de soi – du dedans – et une conscience de l’environnement – du dehors – en s’appuyant sur les échos et réverbérations du monde vivant et du monde d’après la mort (afterworld en anglais).
Les artistes invité·e·x·s – Lola Barrett, Charles Cadic, Clarice Calvo-Pinsolle, Benoît Déchaut, Roxane Marquant, Roxane Rajic, Basile Richon, Pedro Riofrío, Sonia Saroya & Edouard Sufrin, SHIFT Entity – ont en commun de sonder nos interdépendances avec l’environnement à travers l’écoute et le son. Iels tentent – comme le suggère Pali Meursault – de « dépasser cette notion de paysage sonore afin de redéfinir les enjeux de la pratique de terrain et de substituer l’idée d’une relation à l’environnement à celle d’une contemplation du paysage ». Les artistes remettent en cause la dichotomie entre nature et culture de la pensée occidentale et montrent que nature et culture sont, en réalité, en constante interaction et évolution. Iels se rapprochent du concept de « naturescultures » développé par la biologiste, philosophe et historienne des sciences Donna Haraway qui met en avant de nouveaux agencements dans les relations entre vivant·e·x·s et non-vivant·e·x·s. Ce changement de paradigmes transforme la manière dont nous percevons, concevons, aménageons et habitons les territoires.
À travers leurs propositions plurielles – installations, films, interventions, workshops, concerts et performances – les artistes suggèrent d’autres approches du son et invitent à expérimenter la posture d’écoute active. Ces œuvres ouvrent à une introspection sensible, intrinsèquement liée aux réalités matérielles et écologiques de la Terre.
The Tuning of the Afterworld postule que le son, par ses capacités immersives, réactive nos interdépendances avec l’environnement. L’écoute offre une appréhension différente de l’environnement et de ses évolutions, générant de l’empathie et de l’incitation à le préserver. Être au monde plutôt que dans le monde.